Titulaire d’un DNSEP en design graphique interactivité, elle cherche à utiliser le design graphique comme une source de partage et de découverte avec les publics, pour leur donner accès à des choses qui leur étaient jusqu’à maintenant inconnues.
Elle souhaite ouvrir un Café Librairie, toujours dans une volonté d’équité un peu utopique. Avec l’envie de faire découvrir à tous ces livres graphiquement travaillés pour jouer avec les perceptions des lecteurs, mais aussi le partage et l’échange possible entre plusieurs publics. Prenons exemple sur le livre de Matthias Picard, "Jim Curious, Voyage au cœur de l'océan", où le lecteur est invité à mettre les lunettes 3D et voit alors les fonds marins en relief, comme sortant du livre et bougeant. Ce sont donc beaucoup de livres qui interagissent avec les lecteurs, mais qui sont inconnus du grand public.
celine.dubois15@laposte.net
Le travail de Céline Dubois s'inscrit dans la grande tradition du design graphique militant. Les manifestations contre la Loi Travail du printemps dernier ont constitué une expérience initiatique pour la jeune femme. Elle paraît y avoir trouvé un objectif concret vers lequel tourner son activité, venu à point nommé compléter sa formation. Le cadre de la manif’ génère toute une série de contraintes nouvelles, comme la nécessité de textes courts, d'une production en masse peu coûteuse. Il a fait naître un corpus de création graphique à part, avec ses dispositifs spécifiques, comme ce distributeur, porté sur le dos, qui laisse aux manifestants la liberté de prendre les textes imprimés et de ne pas se sentir assujettis à un tractage. Il ne s'agit plus de produire un objet multiple et de laisser à d'autres le soin de le diffuser mais bien d'aller à la rencontre de l'utilisateur, éventuellement d’engager la discussion avec lui : l'objet designé devient le support d’un échange d'autant plus riche qu'il a été conçu avec soin.
En réalité, on retrouve des traits de cohérence avec son travail d’étudiante, en particulier d'un point de vue formel. Ainsi, l’usage d'une ligne brisée colorée qui traverse la page, figure aussi bien dans ses ouvrages comme l’édition du premier chapitre du Maître ignorant de Jacques Rancière que dans les tracts et autres feuillets édités pour les manifestations. Mais à cette rectitude s'opposent désormais les rubans des pochoirs qui ont servi à écrire des citations sur les trottoirs. Reliquats de ces actions, ces rubans blancs s'enroulent sur eux-mêmes comme d'improbables phylactères. La couleur y entoure du vide et fait apparaître en creux les mots qui restent maintenant dans la ville.
Le fond aussi est resté le même : le cœur de cette démarche est toujours de transmettre des textes (Georges Perec, Cormac McCarthy entre autres) afin de provoquer le questionnement. Le travail sur le pli, la mise en page, le choix des polices, l'usage de la couleur... sont autant de moyens de réaliser une transmission qui ne soit pas verticale, qui soit autre chose que l'imposition de mots et d'idées du haut vers le bas. Il s'agit donc toujours de propositions à la fois exigeantes et généreuses, généreuses parce qu'exigeantes, supposant en chacun la qualité d'attention nécessaire à une réception active des messages imprimés.
Marie Frétigny, 2016